Inaptitude et rupture conventionnelle ne font pas bon ménage

Dans une affaire portée devant la Cour d'appel de Poitiers le 28 mars 2012, les dates sont cruciales. Un chauffagiste, présent depuis neuf ans dans une entreprise, avait été victime d’un accident du travail le 5 avril 2007. Le 29 septembre 2008, la médecine du travail avait conclu à l' inaptitude du salarié à son poste avec un nouvel examen prévu le 14 octobre 2008. Pourtant, sans même attendre la deuxième visite médicale, les parties avaient signé le 3 octobre 2008 une rupture conventionnelle du contrat de travail pour le 15 octobre 2008. L'inspection du travail par lettre du 20 octobre 2008, avait refusé d’homologuer sur la base du non respect des délais de rétractation et d’instruction . Les parties avaient donc signé une nouvelle convention et fixé la date de rupture au 15 novembre 2008 ( pour une rupture homologuée le 28 octobre 2008). Entre ces deux évènements, le médecin du travail avait statué définitivement sur l’aptitude du salarié par avis du 14 octobre 2008. Il indiquait que le salarié était  inapte au poste occupé . Six mois après l’homologation administrative, le salarié saisissait le Conseil de prud’hommes des Sables d’Olonne dans le but de faire annuler la rupture conventionnelle de son contrat.  

Par un arrêt du 28 mars 2012 ,la Cour d’appel de Poitiers  estime que "le statut de victime d’accident du travail s’oppose à la rupture conventionnelle du contrat de travail" et que  "l’existence de l’obligation de reclassement à la charge de l’employeur fait obstacle au contournement de cette obligation par le recours à la rupture conventionnelle". En effet, les juges du fond estiment que "la prise en considération de l’état de santé constitue une discrimination s’opposant au recours à la rupture conventionnelle ».

Pour la Cour, non seulement la rupture conventionnelle est annulée, mais la rupture du contrat qui s'en est suivie est également nulle.

Ce faisant, elle s'inspire logiquement des règles qui organisent le licenciement en cas de suspension du contrat de travail pour accident du travail, qui circonscrivent le licenciement à une faute grave du salarié (ou à une impossibilité de maintenir le contrat pour une raison étrangère à la maladie ou l'accident du travail, L.1226-9 du Code du Travail).